Dès l’introduction,
Désenclaver l’histoire peut être compris comme un manifeste en faveur d’une histoire politique revivifiée par des changements profonds qui se sont accélérés dans la seconde moitié du XXe siècle avec la remise en question de l’ancien modèle de l’État-nation dans le contexte de globalisation et/ou de mondialisation. À cette ouverture spatiale s’ajoute le facteur-temps qui est central dans toute démarche historique et qui est marqué par le comblement progressif au fil des années les plus récentes du « polder » pour reprendre la métaphore de l’auteur.
Les nouveaux regards sur le XXe siècle français sont déclinés en six chapitres qui reprennent le contenu d’articles substantiels ou d’ouvrages déjà publiés.
Le premier chapitre intitulé « Réflexions sur l’histoire et l’historiographie du XXe siècle français [2] » légitime l’histoire culturelle du politique qui marque une rupture avec l’historiographie des années 1960. « C’est, écrit l’auteur, le retour au sujet agissant et pensant » (p. 16). En effet l’histoire politique qui est « dégagée de la gangue des corrélations lourdes socio-économiques » redonne sa part d’autonomie au « sujet agissant, acteur de l’histoire » (p. 17) pendant que l’histoire culturelle qui appréhende le sujet pensant « redonne à celui-ci une partie de son libre arbitre ». Sans pour autant renier les approches classiques d’une histoire politique ou sociale qui n’a pas démérité, l’auteur rappelle que les notions de « culture politique » et d’ « écosystème » ont amorcé ce renouvellement historiographique.
Celui-ci est rendu nécessaire par la prise en compte des représentations collectives d’une époque marquée par le passage, dans les années 1960, d’un « trend belliqueux » des guerres mondiales et coloniales à une France en paix et ressentie comme telle par les générations qui n’ont pas vécu les guerres. D’où la proposition de
Le livre se termine sur le septième chapitre, « L’histoire politique à l’heure du "transnational turn" : l’agora, la Cité, le monde… et le temps [8] », qui est un condensé des travaux de l’auteur et une réponse à l’introduction. Il revient sur la reviviscence de l’histoire politique, renouvelée par le culturel et même pourrait-on ajouter par la dimension anthropologique, il revient sur les jeux d’échelles spatiaux, – l’agora, la Cité, le monde –, et sur les jeux d’échelles chronologiques.
Ce chapitre est en quelque sorte un aboutissement qui n’est que temporaire de la réflexion, car nul doute que d’autres publications suivront cet ouvrage. Une réflexion épistémologique qui, prenant acte des changements affectant la République française replacée dans une « culture-monde », propose de nouveaux outils et de nouvelles méthodes pour les comprendre. La discipline historique, elle aussi, ne peut plus ignorer les autres disciplines des sciences humaines et sociales tout en revendiquant son identité propre telle que son attachement à « l’inscription des phénomènes étudiés dans l’épaisseur du temps » (p. 188). En revenant à une démarche plus classique de la discipline historique, qui fait des temporalités le nœud central de sa réflexion,
[1]
[2] Texte publié sous ce titre dans La Revue historique, n° 635, 2005.
[3] « Les Vingt Décisives. Cultures politiques et temporalités dans la France fin de siècle », Vingtième Siècle. Revue d’histoire, n° 44, octobre-décembre 1994 et Les Vingt Décisives, 1965-1985. Le passé proche de notre avenir, Paris, Fayard, 2007, rééd. « Pluriel », 2012.
[4] Article publié dans Vingtième Siècle. Revue d’histoire, n° 63, 2007.
[5] « “Johnny“, un lieu de mémoire ? », Histoire@Politique. Politique, culture, société, n° 16, janvier-avril 2012, www.histoire-politique.fr.
[6] Le Débat, n° 164, 2011.
[7] Mai 68, l’évènement Janus, Paris, Fayard, 2008.
[8] Publié dans La Revue historique, 657, 2011.