Depuis sa création, Histoire@Politique a toujours été une revue ouverte sur l’historiographie internationale et le débat interdisciplinaire. C’est pourquoi, dans l’ensemble de ce numéro qui nous semble très riche, nous attirons plus particulièrement l’attention de nos lecteurs sur deux articles qui attestent la volonté constante de la revue d’innover et d’ouvrir le débat avec des historiens et des chercheurs d’autres disciplines, français et étrangers.
L’excellent dossier, coordonné par Sébastien-Yves Laurent et Jean-François Sirinelli, consacré à la figure du préfet Maurice Grimaud, est complété, dans la rubrique « Pistes et débats », par un politiste, Gildas Tanguy. Celui-ci propose, du point de vue de la socio-histoire, des réflexions programmatiques pour une recherche interdisciplinaire sur la fonction préfectorale restituée dans une longue temporalité historique et dans le contexte d’une historiographie internationale qui s’intéresse à l’évolution des fonctions de l’État.
Dans la rubrique « Varia », l’article de Jane Burbank, historienne jouissant d’une grande renommée internationale, s’interroge sur la longue durée des pratiques de la souveraineté dans la région de Kazan qui appartient, de nos jours, à la Fédération de Russie. À partir de ce cas, l’auteur livre une analyse stimulante des particularités de la « souveraineté eurasienne ».
Ces deux articles susciteront peut-être des réactions parmi les historiens et nous nous proposons qu’Histoire@Politique les accueille. Ces débats ouverts sur l’international et les autres disciplines nous semblent particulièrement importants et intéressants parce qu’ils contribuent à renforcer et à renouveler l’histoire politique en France. Ce qui constitue plus que jamais l’objectif central de notre revue.
Jakob Vogel, rédacteur en chef et Marc Lazar, directeur de la revue.
Au sein d’une historiographie de l’État et des administrations publiques qui s’est considérablement enrichie et renouvelée depuis une vingtaine d’années – embrassant des dimensions très hétérogènes de l’appareil étatique (histoire économique, juridique, politique, sociale, etc.) –, l’institution préfectorale (à l’instar d’ailleurs d’autres corps de la haute fonction publique) est longtemps demeurée en retrait de ce foisonnement intellectuel et empirique. Sans doute parce que deux grandes traditions de recherches – l’histoire politique du corps puis l’approche systémique de l’institution telles que nous les qualifions ici – ont largement prédominé, cristallisant et durcissant ainsi une certaine vision de l’institution. Fort de ce constat, l’article s’attarde sur les apports heuristiques d’une historiographie récente qui a cherché à dépasser et à renouveler ces approches classiques en jetant les bases d’une ethnologie et d’une anthropologie des pratiques administratives préfectorales, mettant ainsi en scène les administrateurs départementaux dans leur pratique quotidienne et routinière du métier. Si ces travaux novateurs ont permis une relecture de l’institution plus que féconde, ils n’épuisent pas bien évidemment le champ des possibles. L’article propose ainsi quelques pistes et chantiers de recherche qui mériteraient d’être entrepris à court et moyen terme.
Les archives des Verts conservées au Centre international de recherche sur l’environnement (CIRE) constituent un ensemble précieux pour l’historien de l’écologie politique. Leur consultation est cependant rendue malaisée, laborieuse et aléatoire en raison de l’absence de classement des fonds. Mais, au-delà de la contrainte qu’elle représente, la persistance de cet état primaire offre à l’historien un matériau supplémentaire à analyser. L’intérêt du fonds d’archives ne réside plus seulement dans son contenu mais également dans sa forme, le domaine de l’archivistique créant la possibilité d’un regard nouveau sur l’histoire des partis politiques.