La Première Guerre mondiale demeure, cent ans après le déclenchement du conflit, au cœur du récit national britannique et continue de provoquer (...)
La Première Guerre mondiale demeure, cent ans après le déclenchement du conflit, au cœur du récit national britannique et continue de provoquer des débats virulents. Dans ce contexte, l’historiographie de l’expérience britannique du conflit se distingue par un dynamisme et une ouverture disciplinaire renforcés par l’internationalisation de ce champ d’étude. La recherche se concentre désormais sur l’adaptation de la société et de l’armée britanniques aux conditions nouvelles de la guerre industrielle. Trois questions majeures traversent donc la production scientifique : celle de la transformation de l’appareil militaire britannique ; la mobilisation de la société et de l’économie de la Grande-Bretagne ; l’impact et les legs de la Grande Guerre outre-Manche.
Mots clés : Première Guerre mondiale ; historiographie ; histoire militaire ; histoire culturelle ; histoire sociale ; Grande-Bretagne.
100 years after the outbreak of the First World War, the conflict retains a central position within the British national narrative and continues to generate heated public controversies. In this context, the historiography of the British experience of the war stands out for its dynamism, interdisciplinarity and degree of internationalization. Scholars now primarily focus on the adaptation of the British army and society to industrial warfare and concentrate on three major issues: the transformation of the British armed forces and operational capacity; the social and economic mobilization of Great Britain; the impact and legacy of the conflict across the Channel.
Key words: First World War; Historiography; Military History; Cultural History; Social History; Great Britain.
La séquence est aussi dramatique qu’emblématique. Réunis au fond de leur tranchée dans un silence de plomb quelques secondes avant de se lancer à l’assaut, des soldats britanniques croient un instant que les canons se sont tus et que
Pour la société britannique en effet,
Si les historiens de la Grande-Bretagne en guerre proposent aujourd’hui une critique systématique de cette vision, il n’en demeure pas moins difficile d’extraire l’analyse du conflit d’un contexte mémoriel parfois pesant et qui explique, en partie, les difficultés des historiens à se détacher du récit national dominant. La guerre pose en effet, en Grande-Bretagne comme dans d’autres pays belligérants, une série de questions politiques et éthiques qui touchent au cœur même de l’identité nationale du pays et mettent en question son rapport à l’Europe et au monde. À l’occasion du centenaire du conflit, la mémoire de
Face à cette forte demande sociale, les spécialistes de
L’historiographie du conflit a, enfin, largement bénéficié, comme d’autres périodes et d’autres objets historiques du très fort degré d’internationalisation des universités et des cursus britanniques. L’histoire nationale se nourrit ainsi au contact direct des spécialistes d’autres aires géographiques.
À la faveur de ces évolutions intellectuelles et institutionnelles, les débats historiographiques s’articulent désormais autour d’une problématique centrale, celle de l’adaptation de la société et de l’armée britanniques aux conditions nouvelles de la guerre industrielle. Trois questions majeures traversent donc la production scientifique : celle de l’adaptation de l’appareil militaire britannique ; la mobilisation de la société et de l’économie de la Grande-Bretagne ; l’impact et les legs de
La crise diplomatique et le déclenchement du conflit surprirent la hiérarchie militaire britannique autant que les diplomates de Sa Majesté. Désemparés par une crise balkanique et régionale qu’ils espéraient voir circonscrite aux confins de l’Empire austro-hongrois, ils se trouvèrent néanmoins, au mois d’août 1914, devant un problème remettant en cause les fondements de leur positionnement stratégique.
Première puissance maritime et commerciale, la Grande-Bretagne avait, dans la construction de son système de défense, mis la priorité sur la protection de ses possessions impériales et des routes commerciales dont son empire comme son économie nationale dépendaient. L’engagement dans une guerre continentale était-il véritablement nécessaire à la préservation des intérêts britanniques quand « l’art britannique de la guerre » (The British Way of War) semblait le proscrire [3] ? Le pays avait, dans les premières années du XXe siècle réglé la plupart des questions coloniales. En Afrique, la rivalité franco-britannique illustrée par la crise de Fachoda s’était apaisée, avant que les deux pays ne concluent une Entente cordiale qui, à partir de 1904, répartissait notamment le rôle maritime de chaque puissance. En Asie, la « grande partie » qui traditionnellement opposait la couronne britannique à la Russie tsariste pour le contrôle de l’accès au sous-continent indien avait été abandonnée, tout comme la rivalité avec le Japon (1902), au profit d’un statu quo qui permettait à chacun de se consacrer à d’autres priorités stratégiques et domestiques. Près d’un siècle après la défaite des armées napoléoniennes, la Grande-Bretagne semblait en mesure de rester pour longtemps encore à l’écart de tout conflit continental. La manière dont elle plongea pourtant dans
Paradoxalement peut-être pour ce bon connaisseur de l’Allemagne des XIXe et XXe siècles, cette analyse contraste avec le poids généralement accordée à la rivalité anglo-allemande dont Paul Kennedy, en particulier, avait souligné l’importance [5] . Cette rivalité, déclinée en termes économiques, militaires et navals, mais également coloniaux, n’explique évidemment pas à elle seule le déclenchement du conflit. La Weltpolitik chère à l’ancien chancelier von Bülow remettait toutefois en cause l’équilibre des puissances auquel tenait le gouvernement britannique. Incapable de contenir la crise balkanique de juillet 1914, l’Empire allemand simplifia radicalement l’équation stratégique et politique britannique avec l’invasion, au mois d’août, de
Alors qu’il est d’usage de souligner le degré d’impréparation des états-majors et des gouvernements de 1914, Kitchener se distingua au contraire en proposant la création d’une armée de masse et le recrutement immédiat de six nouvelles divisions. On doit à Peter Simkins une excellente étude de la mise en place de ces « nouvelles armées » [10] . En mars 1915, les armées dites « de Kitchener » comptaient vingt-neuf divisions d’infanterie et portaient ainsi le total de divisions disponibles à soixante-quinze. L’armée britannique disposait de 2 millions d’hommes à la mi-1915, de 3 millions à l’été 1916. Elle en comptait près de 4 millions au début de 1918 ; près de sept fois et demie sa taille de 1914 [11] .
Bien sûr, 1914 marque également le début de l’apprentissage de la guerre industrielle. Ce processus, dont l’analyse est – nous le verrons – au cœur du débat historiographique, fut ponctué par une série de batailles désormais ancrées, comme les batailles de Mons ou d’Ypres, dans la mémoire collective du conflit [12] . À l’instar de leurs alliés et de leurs ennemis, les armées britanniques portèrent sur le champ de bataille une puissance de feu inédite dont elles maîtrisaient mal l’usage. L’histoire militaire britannique de
L’analyse de la performance des armées britanniques en campagne est en effet indissociable de celle d’un système de recrutement caractérisé par le passage, en temps de guerre, du volontariat à
Indéniable, le consentement des Britanniques à l’effort de guerre ne s’explique toutefois pas aisément et il est essentiel de souligner la pluralité des motivations positives (enthousiasme nationaliste, patriotisme défensif…) ou négatives (pression des pairs, situation économique…) présidant à l’engagement volontaire [14] . La mobilisation militaire de 1914 souligne en outre les particularités du système régimentaire britannique. Réorganisé au tournant du siècle pour renforcer des liens traditionnellement distendus entre société civile et armée, le système régimentaire localisait l’expérience militaire et combattante, facilitant ainsi, au-delà du recrutement, l’appropriation de l’expérience militaire par les communautés locales, et renforçait la cohésion des unités engagées sur le champ de bataille [15] . La place du volontariat, comme le rôle dévolu aux sociétés civiles locales, dans l’organisation et le soutien aux forces armées expliquent également le poids des Pals Battalions, ces bataillons de « copains », dans l’expérience comme dans la mémoire britannique de
Ces spécificités institutionnelles et sociologiques, frappantes vues d’outre-Manche, ne sont pourtant pas au cœur du débat historiographique. Ce dernier demeure à certains égards obnubilé par les réponses tactiques et opérationnelles apportées au blocage stratégique sur le front occidental. Incapable de peser sur la marche des opérations continentales en 1914, déterminée pour l’essentiel par les initiatives allemandes et les réponses française et russe, la Grande-Bretagne contribue néanmoins par sa présence navale et ses possessions impériales à la globalisation du conflit. Engagée dans quelques poursuites dans l’Atlantique Sud et le Pacifique, la Navy concentra ses efforts sur la protection des îles Britanniques et des routes commerciales irriguant son empire [17] . L’impact stratégique de la contribution de la marine royale fut souligné, paradoxalement peut-être, par une bataille navale, celle de Jutland en 1916, dont l’issue tactique s’apparente à un match nul. Jutland consacra l’émasculation stratégique de la flotte allemande, désormais confinée dans ses ports de la mer Baltique [18] . En réponse, le déploiement de submersibles et le déclenchement de la guerre sous-marine à outrance par le haut-commandement allemand ne parvinrent pas à saper la mobilisation des circuits économiques et financiers de
Établi dès l’automne 1914, le blocage stratégique sur le front occidental encouragea les stratèges britanniques – et Kitchener en particulier – à limiter l’engagement de leur armée, tout en espérant que les alliés français et russes ne s’effondrent pas sous les assauts des puissances centrales avant 1917, date à laquelle la Grande-Bretagne espérait pouvoir jouer un rôle de premier plan [20] . Dans le même temps, un débat parfois houleux occupait les tenants d’une stratégie focalisée sur le front d’Europe occidentale (Westerners) aux tenants d’une approche centrée sur les fronts périphériques (Easterners). L’échec des opérations navales dans les Dardanelles et, surtout, celui de l’offensive alliée à Gallipoli trancha le débat en faveur des premiers. Relancé dans les années 1960 par les critiques formulées par John Terraine ou Corelli Barnett à l’encontre de Basil Liddell Hart (1895-1970), commentateur militaire réputé et Easterner de premier plan, ce débat a largement perdu de son intensité [21] .
L’essentiel des « passions » historiographiques se concentre en effet sur les réponses tactiques et opérationnelles apportées sur le front de France et de Flandres. À bien des égards, le débat se concentre ici sur la valeur du commandement britannique et en particulier sur la personne de Douglas Haig. Figure populaire à sa mort en 1928, Haig fait depuis régulièrement l’objet de véritables campagnes de dénigrement et de réhabilitation qui témoignent des relations aussi tendues qu’étroites entre histoire et mémoire du conflit en Grande-Bretagne. Principal commentateur militaire et stratégique britannique de l’entre-deux-guerres à sa mort, Basil Liddell Hart fournit – tout comme les mémoires de Lloyd George – encore bien des arguments aux contempteurs du commandement britannique en 1914-1918 [22] . C’est pourtant la publication de The Donkeys qui cristallisera, dans les années 1960, la critique de Haig dans la mémoire collective britannique. En même temps, la voix alors solitaire de John Terraine se distinguait dans ce concert de condamnations pour souligner, a contrario, l’intelligence, la flexibilité et l’ouverture d’esprit d’un chef vilipendé pour son incapacité à prendre la mesure du conflit [23] . L’ombre de Terraine plane encore sur une large part de l’histoire militaire dite « révisionniste » qui prend le contre-pied de la mémoire dominante. Menée notamment par Gary Sheffield [24] , cette école a renouvelé notre compréhension de la guerre d’usure et mit en lumière le processus d’apprentissage (learning curve) de l’armée britannique et de son commandement [25] . Le déploiement de nouvelles technologies du combat illustré notamment par la création du corps de mitrailleuses en 1915 et du corps blindé en 1916 n’est ainsi qu’un des aspects mis en avant par un groupe d’historiens soucieux de réévaluer la performance tactique et opérationnelle des armées britanniques [26] . Il n’en faudrait toutefois pas conclure à l’émergence d’un consensus parmi les experts du militaire. En témoignent par exemple, les réserves formulées à l’encontre de cette learning curve par Robin Prior et Trevor Wilson dans leur analyse de la bataille de la Somme [27] .
Si cette bataille concentre encore l’attention du public et des historiens, le débat s’est lui recentré sur ces « cent jours » de 1918 durant lesquels les armées britanniques contribuèrent à repousser l’offensive allemande du printemps et permirent ainsi la victoire alliée. La focale récente sur 1918 répond aux prescriptions de Terraine [28] qui regrettait le peu d’intérêt que semblaient porter les historiens aux conditions de la victoire finale. Gary Sheffield a depuis souligné l’importance de la coordination interarmes dans les opérations de 1918, tandis que Jonathan Boff mit directement la performance de l’armée britannique en regard de son opposition allemande [29] .
Alors que l’on attendrait de l’historiographie militaire qu’elle s’adapte une bonne fois pour toute à la nature d’une guerre de coalition, les approches transnationales et comparées demeurent trop rares [30] . Soucieux d’explorer – si ce n’est de célébrer – l’exception britannique, le primat du cadre national obère finalement une meilleure compréhension de l’expérience britannique du conflit. Les travaux de William Philpott ou d’Elizabeth Greenhalgh, malgré leur profond désaccord [31] , ont pourtant démontré tout l’intérêt qu’il y a à dégager l’historiographie de son carcan national [32] . C’est dans cet esprit qu’Alexander Watson reprit à nouveaux frais les questions soulevées par la résilience des combattants britanniques et allemands. Il souligna de la sorte l’importance du paternalisme du commandement jusqu’alors considéré comme l’apanage des sous-officiers britanniques [33] .
Sortir l’histoire-bataille britannique des exceptionalismes nationaux et chronologiques pour replacer, à l’invitation de Hew Strachan, l’expérience britannique dans le contexte plus large des transformations du phénomène guerrier : tel est le principal défi pour une histoire militaire qui se distingue par sa vitalité [34] .
Mieux connue peut-être du lectorat francophone, l’histoire sociale et culturelle de la Grande-Bretagne entre 1914 et 1918 semble, elle, mieux intégrée au mouvement historiographique soutenu par les approches transnationales de
Curieusement néanmoins, l’entrée en guerre de la Grande-Bretagne n’a que récemment fait l’objet d’analyses systématiques comparables aux analyses de Jean-Jacques Becker et de Jeff Verhey pour la France et l’Allemagne [36] . Si la déclaration de guerre à l’Allemagne est d’abord une réponse au défi stratégique posé par l’Allemagne, le gouvernement britannique répondait également à l’émotion provoquée dans le pays par l’invasion de la Belgique et, dans une moindre mesure, de
À l’instar de leurs alliés français comme de leurs ennemis allemands, les Britanniques s’engagèrent dans une guerre qu’ils subissaient, mais dont l’enjeu n’était ni plus ni moins que la survie du royaume [39] . Chaque groupe social investissait alors ce conflit défensif d’une dimension existentielle. Ici la mobilisation spontanée de la plupart des groupes sociaux et politiques, soutenue plus qu’encadrée par l’État, rend compte de la pluralité de cultures de guerre qui s’élaboraient à mesure que l’on s’installait dans le conflit [40] . La guerre constituait un défi particulier aux groupes politiques ou religieux dont l’identité était fortement liée au pacifisme. L’objection de conscience – bien que rare – témoignait en particulier de la force du sentiment religieux au sein des communautés non conformistes [41] . Le pacifisme politique, souvent lié bien sûr à la dénonciation éthique de la guerre, se trouva incapable de formuler une riposte d’ampleur, empêché par les ambiguïtés du libéralisme britannique comme par la reconnaissance par bien des pacifistes du droit à la légitime défense [42] .
En dépit de spécificités souvent mal reconnues outre-Manche, la société britannique illustre les dynamiques culturelles de la mobilisation identifiées en France, par
S’appuyant sur une tradition politique et intellectuelle radicale, plusieurs historiens se sont également attachés à la contrainte et à la discipline militaire comme aux résistances qu’elles suscitèrent. Histoire et mémoire se rejoignent ici ; la controverse suscitée par le possible pardon des fusillés britanniques procédant et suscitant de nouvelles recherches historiques [49] . Là encore, les travaux de Christoph Jahr illustrèrent l’intérêt de la comparaison en mettant en lumière le caractère strict de la discipline britannique [50] . Aussi libéral fût-il, le système politique britannique s’accommoda fort bien en effet de la contrainte étatique.
La mobilisation de l’économie britannique entre 1914 et 1918 révéla de même que les prescriptions de la théorie économique libérale le cédaient en définitive aux nécessités de
À l’instar des autres belligérants, la Grande-Bretagne se trouva également contrainte d’adapter son appareil industriel aux besoins de la guerre de masse. “Business as usual” apparut ainsi vite comme un vœu pieu autant que comme un slogan vide de sens au regard des besoins des armées en campagne [54] . La croissance des effectifs militaires provoqua en effet très vite une pénurie de fusils, de canons, et de munitions. Tout autant que leur nombre, les industries de guerre devaient en outre assurer le maintien de leur qualité quand le sort des armes dépendait directement des industries nationales. En 1915, la crise dite des munitions provoqua la chute du gouvernement libéral d’Asquith, contraint de former un cabinet de coalition. L’histoire de cette conversion douloureuse à l’économie de guerre se place en effet tout autant au chapitre des transformations de l’État britannique [55] .
Dès les premières semaines du conflit, ce dernier chercha à imposer sa marque sur la société civile dont les libertés et l’autonomie furent considérablement réduites par le Defense of the Realm Act de 1914. Adossée à la propagande d’État pour l’essentiel consacrée au recrutement, la censure ne parvint toutefois pas à isoler la société britannique des mauvaises nouvelles du front [56] . Surtout, la société civile, par le truchement de la presse et des associations, affirma une réelle autonomie qui se traduisait à la fois par une auto-censure et une critique de la propagande et de la censure d’État [57] . À partir de 1917, l’État britannique lança une campagne de remobilisation de l’opinion qui s’appuyait tout autant sur ses ressources propres que sur la société civile [58] .
La direction stratégique et économique de l’effort de guerre britannique provoqua de réelles tensions entre pouvoir civil et pouvoir militaire [59] . L’analyse de ces affrontements fut largement influencée par « la guerre des mémoires » que se livrèrent généraux et hommes politiques – Lloyd George et Haig en particulier – dans l’entre-deux-guerres. Ces débats révèlent toutefois les transformations de la gouvernance induites par celles du phénomène guerrier. L’autonomie du militaire était en effet réduite par les exigences de la guerre industrielle, offrant au politique comme aux pouvoirs économiques la possibilité de peser sur les affaires militaires de
La guerre industrielle redéfinit également les contours de l’État en réponse à un impératif de gestion et de justice sociale. Les besoins matériels et humains des armées britanniques contribuèrent à la mise en œuvre d’un corporatisme du temps de guerre, marqué non seulement par la collaboration du patronat et des syndicats, mais plus sûrement par la capacité de l’État à accepter les concessions financières et juridiques qu’ils réclamaient pour assurer leur engagement [61] . Le recrutement militaire et la mise en œuvre de la conscription tout comme la gestion des services publics requirent eux aussi la participation de la société civile [62] . Dans ce contexte, l’effort de guerre britannique bénéficia du pragmatisme et du pluralisme d’un système politique capable de s’affranchir des prescriptions du libéralisme pour répondre aux besoins de la défense nationale.
Il n’en faudrait toutefois pas conclure au caractère consensuel de la mobilisation sociale. Comme dans d’autres pays belligérants, les conflits sociaux étaient en effet indissociables du consentement à la guerre ; un consentement âprement négocié par des acteurs sociaux, économiques, et politiques convaincus que leur sacrifice patriotique (humain ou matériel) leur permettait de contester vigoureusement la gestion de l’effort de guerre [63] . Si le nombre de jours de grèves passa de dix millions en 1914 à six millions en 1918, le nombre de grévistes doubla lui pour atteindre 923 000. Comme le remarqua Niall Ferguson, les ouvriers britanniques se montrèrent bien plus revendicatifs que leurs homologues allemands en dépit de conditions matérielles et économiques plus favorables [64] .
L’indéniable choc que constitua
Célébrée par Marwick, l’émancipation économique, politique et sexuelle des femmes britanniques continue d’alimenter le débat historiographique. Les femmes britanniques ne découvrirent pas le travail grâce à la mobilisation industrielle, mais se saisirent des opportunités offertes par la guerre et quittèrent notamment les emplois ménagers [68] . Si la pénurie de domestiques décrite par la série télévisée Downton Abbey fut bien réelle, il est plus difficile d’apprécier le degré réel d’émancipation sociale et politique des femmes britanniques. Leur contribution à l’effort de guerre modifia profondément les représentations et mit en question les rapports de genre traditionnels. Le Representation of the People Act qui, en 1918, étendit le droit de vote aux femmes de plus de 30 ans, contribuables ou épouses de contribuables, traduisit ainsi les ambivalences de la mobilisation sociale. Reconnaissance du service patriotique, le droit de vote y était en effet accordé dans le même temps aux jeunes hommes, ouvriers pour la plupart, qui ne satisfaisaient pas jusque-là aux conditions de résidence ou de revenus que les électeurs devaient remplir. Demeuraient exclues de cette citoyenneté formelle toutes les jeunes femmes de moins de 30 ans et les ouvrières qui avaient néanmoins incarné, dans les usines de guerre, et les corps auxiliaires, la mobilisation patriotiques des Britanniques [69] . Par ailleurs, les femmes durent faire face après-guerre à un « retour de bâton » anti-féministe qui affermit la domination masculine dans les sphères privée et économique [70] . L’heure y était alors en effet, selon Lloyd George, à la construction d’un pays digne de héros (« a fit country for heroes to live in »).
Au sortir de la guerre, la société s’interrogeait en effet sur le sens à donner à un conflit dont elle craignait, plus qu’elle n’illustrait, les effets brutalisateurs [71] . L’expérience médicale du conflit avait ainsi révélé que les traumatismes de
Les études de la sortie de guerre britannique se distinguent ainsi par leur ouverture aux sciences humaines et sociales. L’histoire britannique de
« Déluge », « armageddon » ou « catastrophe » : de telles métaphores accréditent l’idée que les historiens britanniques de
Pour citer cet article : Pierre Purseigle, « Écrire l’histoire du Déluge. Histoire et expérience britanniques de
[1] Blackadder Goes Forth est en fait la quatrième et dernière saison d’une série lancée en 1983. Elle entraîne les téléspectateurs à travers une série de tableaux comiques, chacun situé dans une période de l’histoire du royaume, du Moyen Âge à
[2] A.J.P. Taylor, The First World War, an Illustrated history., H. Hamilton, London, 1963, 224 p. ; Dan Todman, The Great War.Myth and Memory, London, Hambledon and London, 2005.
[3] Michael Howard, « The British Way in Warfare: a Reappraisal », dans The Causes of Wars and Other Essays, London, Temple Smith, 1983, p. 189-207 ; Paul Kennedy, The Rise and Fall of British Naval Mastery, London, A. Lane, 1976 ; Hew Strachan, « The British Way in Warfare Revisited », Historical Journal, 1983, no 26, p. 447-461.
[4] Niall Ferguson, The Pity of War,
[5] Paul Kennedy, The Rise and Fall of British Naval Mastery,
[6] Hew Strachan, The First World War, vol. I: To Arms, Oxford University Press, Oxford, 2001.
[7] Michael Howard, The Continental Commitment: the Dilemma of British Defence Policy in the Era of the Two World Wars, London, Temple Smith Ltd, 1972.
[8] Pierre Purseigle, « Pax Britannica : ordre impérial et exportation de la violence », dans Géraldine Vaughan, Julien Vincent, Clarisse Berthezène et Pierre Purseigle (dir.), Le monde britannique 1815-1931, Paris, Belin, 2010, p. 157-183.
[9] Hew Strachan, The Politics of the British Army,
[10] Peter Simkins, Kitchener’s Army: the Raising of the New Armies, 1914-16, Manchester, Manchester University Press, 1988, 359 p.
[11] I.F.W Beckett et Keith Simpson (eds.), A Nation in Arms: A Social Study of the British Army in the First World War, Manchester-Dover N.H, Manchester University Press, 1985, 276 p.
[12] I.F.W Beckett, Ypres: the First Battle, 1914, Harlow, Pearson, 2004, 221 p.
[13] John Terraine, White Heat: the New Warfare 1914-18, London, Sidgwick & Jackson, 1982, 352 p.
[14] Ian F.W. Beckett et Keith Simpson (eds.), A Nation in Arms. A Social Study of the British Army in the First World War, Manchester, Manchester University Press, 1985, 276 p.
[15] Helen McCartney, Citizen Soldiers: the Liverpool Territorials in the First World War, Cambridge, Cambridge University Press, 2005, 275 p. David French, Military Identities. The Regimental System, the British Army, and the British People, c. 1870-2000, Oxford, Oxford University Press, 2005, 404 p. Michael Finn, « Local Heroes: War News and The Construction of "Community" in Britain, 1914-1918 », Historical Research, 2008, p. 1‑24. Pierre Purseigle, Mobilisation, sacrifice, et citoyenneté. Angleterre-France, 1914-1918, Paris, Les Belles Lettres, 2013, 450 p.
[16] Mark Connelly, Steady the Buffs! A Regiment, a Region, and the Great War,
[17] James Goldrick, The King’s Ships Were at Sea: The War in the North Sea, August 1914-February 1915, Annapolis, Md, Naval Institute Press, 1984, 356 p. Paul G. Halpern (A Naval History of World War I, Annapolis, Md, Naval Institute Press, 1994, 591 p.
[18] Jon Tetsuro Sumida, “A Matter of Timing: The Royal Navy and the Tactics of Decisive Battle, 1912-1916”, Journal of Military History, janvier 2003, vol. 67, no 1, p. 85-136. Nicholas A. Lambert, “ ‘Our Bloody Ships’ or ‘Our Bloody System’?
[19] Dwight Messimer, Find and Destroy: Antisubmarine Warfare in World War I, Annapolis, Naval Institute Press, 2001, 312 p.
[20] David French, The Strategy of the Lloyd George Coalition, 1916-1918, Oxford, Oxford University Press, 1995, 332 p. David French, British Strategy & War Aims, 1914-1916, London and Boston, Allen &Unwin, 1986, 274 p. Brock Millman, Pessimism and British War Policy, 1916-1918, London, Frank Cass, 2001, 322 p.
[21] Jenny Macleod, Gallipoli: Making History, London, Frank Cass, 2004. Jenny Macleod, Reconsidering Gallipoli,
[22] Basil Liddell Hart, The Real War,
[23] John Terraine, Douglas Haig, The Educated Soldier,
[24] G.D. Sheffield et J.M. Bourne (dir.), Douglas Haig: War Diaries and Letters, 1914-1918, London, Weidenfeld & Nicolson, 2005, 550 p. Gary Sheffield, Forgotten Victory: The First World War: Myths and Realities, London, Headline, 2001, 298 p. Gary D. Sheffield, The Chief: Douglas Haig and the British Army, London, Aurum, 2012, 462 p.
[25] Simon Robbins, British Generalship During the Great War: the Military Career of Sir Henry Horne (1861-1929), Ashgate, Farnham,
[26] Shelford Bidwell, Fire-Power: British Army Weapons and Theories of War 1904-1945, Boston, Allen & Unwin, 1985, 327 p. Robin Prior et Trevor Wilson, Command on the Western Front: The Military Career of Sir Henry Rawlinson, 1914-1918, Basil Blackwell, Oxford, UK; Cambridge, Mass., USA, 1992, 421 p. Paddy Griffith (ed.), British Fighting Methods in the Great War, London; Portland, Or, F. Cass, 1996, 191 p. J.P. Harris, Douglas Haig and the First World War, Cambridge, Cambridge University Press, 2009. Stephen Badsey, The British Army in Battle and its Image 1914-1918, London, Continuum, 2009, 238 p. Stephen Badsey, Doctrine and Reform in the British Cavalry 1880-1918, Ashgate Publishing, Ltd., 2008, 386 p. Jim Beach, Haig’s Intelligence GHQ and the German Army, 1916-1918, Cambridge, Cambridge University Press, 2013.
[27] Robin Prior, Trevor Wilson, The Somme,
[28] John Terraine, To Win a War: 1918, The Year of Victory,
[29] Gary Sheffield, Forgotten Victory: The First World War: Myths and Realities, London, Headline, 2001, 298 p. Jonathan Boff, Winning and Losing on the Western Front: The British Third Army and The Defeat of Germany in 1918, Cambridge, Cambridge University Press, 2012, 308 p.
[30] Cette situation est d’autant plus surprenante que les meilleures synthèses produites par des historiens britanniques illustrent les vertus d’approches comparées et transnationales. Hew Strachan, The First World War, vol. I : To Arms,
[31] E. Greenhalgh, « Why the British Were on the Somme in 1916 », War in History, 1 avril 1999, vol. 6, no 2, p. 147-173. Elizabeth Greenhalgh, « Flames over the Somme: A Retort to William Philpott », War in History, 1 juillet 2003, vol. 10, no 3, p. 335-342. William Philpott, « Why the British Were Really on The Somme: A Reply to Elizabeth Greenhalgh », War in History, 1 novembre 2002, vol. 9, no 4, p. 446-471.
[32] Elizabeth Greenhalgh, Victory Through Coalition: Britain and France During the First World War, Cambridge, Cambridge University Press, 2005, 304 p. William Philpott, Bloody Victory: the Sacrifice on the Somme and the Making of the Twentieth Century, London, Little Brown, 2009, 721 p.
[33] Alexander Watson, Enduring the Great War: Combat, Morale and Collapse in the German and British Armies, 1914-1918, Cambridge, Cambridge University Press, 2008, 312 p. Gary Sheffield, Leadership in the Trenches: Officer-Man Relations, Morale and Discipline in the British Army in the era of the First World War, Basingstoke, Macmillan, 2000, 270 p.
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[38] Adrian Gregory, The Last Great War: British Society and the First World War,
[39] Catriona Pennell, A Kingdom United Popular Responses to the Outbreak of the First World War in Britain and Ireland., Oxford University Press, Oxford, 2012, 336 p.
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[44] Voir les propositions faites en conclusion de Pierre Purseigle, Mobilisation, sacrifice, et citoyenneté. Angleterre - France, 1914-1918, Paris, Les Belles Lettres, 2013, 450 p.
[45] J.G. Fuller, Troop Morale and Popular Culture in the British and Dominion Armies 1914-1918,
[46] Michael Roper, The Secret
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[78] The Daily Mail, 2 janvier 2014. Voir l’excellente réponse de l’historien Richard Evans dans The Guardian, 6 janvier 2014.
Pierre Purseigle est Associate Professor en histoire européenne à l’université de Warwick et Marie Curie Research Fellow à l’université de Yale et à Trinity College Dublin. Co-fondateur de la Société internationale d’étude de la Grande Guerre (www.firstworldwarstudies.org), il dirige la revue First World War Studies. Il est l’auteur de Mobilisation, Sacrifice, Citoyenneté. Angleterre-France, 1900-1918 (Les Belles Lettres, 2013) et co-dirige, avec Adam Seipp, The Oxford Handbook of WWI (Oxford University Press, 2014).