Interroger, dans une perspective longue, le positionnement et le rôle des mathématiciens dans les guerres des XIXe et XXe siècles, telle était l’ambition du colloque qui s’est tenu à l’Institut des sciences de la communication du CNRS le 8 février 2012. « Des mathématiciens et des guerres : histoires de confrontations », le titre donné au colloque annonçait d’emblée son ambition de réunir des études de cas à des échelles variées (du mathématicien unique à une communauté transnationale de scientifiques) sans aspirer à une exhaustivité inenvisageable sur une période de deux siècles. De ce point de vue, cette journée adoptait une position différente et complémentaire des travaux jusqu’ici menés sur les scientifiques en guerre qui se sont largement concentrés sur un conflit unique – et en particulier sur
Au fur et à mesure que le XXe siècle s’éloigne et que, en son sein, la période antérieure aux années 1960 devient mécaniquement encore plus lointaine, la discipline historique peut et doit, à leur propos, se lester d’anthropologie. Si, ainsi formulé, le constat peut surprendre, il est, en fait, parfaitement logique. Une démarche d’anthropologie historique, en effet, est fondée sur le principe d’étrangeté : on ne peut la mettre en œuvre que sur des groupes humains qui sont littéralement étrangers au chercheur par la distance géographique – c’est le cas le plus fréquent – ou chronologique. Dans ce dernier cas, l’écoulement du temps fait qu’à un moment donné, c’est la société même du chercheur qui lui devient suffisamment lointaine pour qu’il puisse adopter à son propos un protocole anthropologique. En d’autres termes, c’est ici l’éloignement du temps qui crée la distance, elle-même génératrice de l’étrangeté qui sied. Cela étant, généralement seule l’épaisseur chronologique multiséculaire met la communauté nationale à laquelle appartient le chercheur suffisamment à distance pour que celle-ci, dans sa version antérieure, devienne pour lui un « monde que nous avons perdu ». Une telle formule, que l’historien Peter Laslett appliquait dans les années l1960 au monde britannique pré-industriel, résume bien le protocole anthropologique quand il est créé par l’écoulement du temps et non par la distance géographique. Pour autant, un tel écoulement générateur d’éloignement est forcément variable dans son amplitude, et c’est là que nous retrouvons le XXe siècle d’avant les années 1970. À partir de la décennie précédente s’enclenche en France une mutation telle que la France du premier XXe siècle est vite devenue, en raison d’un tel basculement socioculturel, un monde que nous avons perdu. Il est donc des moments, dans l’histoire des communautés nationales, où l’écoulement du temps se fait au carré et où une telle accélération confère donc une distance elle aussi au carré.
Quiconque souhaite savoir comment se construit l’histoire, comment elle s’écrit, comment elle se pense et comment elle s’enseigne trouvera dans la somme que constituent les deux tomes d’Historiographies un état des lieux qui comble une lacune après « trente ans de débats, de remises en cause et de renouvellements », comme le disent très justement les quatre co-directeurs dans l’introduction de l’ouvrage. Ils annoncent d’emblée leur ambition : répondre au besoin de « faire le point sur l’histoire comme discipline qui produit des connaissances, mais aussi de mettre en perspective les usages contemporains du passé ». L’histoire, les mémoires et le patrimoine occupent en effet dans l’espace public une place importante.
La sensibilité des rapports des sociétés à leur passé en fait aujourd’hui un enjeu politique. Ce rapport social au temps, que François Hartog a bien caractérisé avec la notion de « régimes d’historicité » (qu’il présente dans un des articles du dictionnaire), a contribué à une redéfinition de l’histoire. Les directeurs de l’ouvrage mettent aussi en avant la nécessité du « détour historiographique » découlant de « la prise de conscience que l’écriture historienne n’est pas un simple reflet passif du réel mais résulte d’une tension indépassable entre le souci de rendre compte de ce qui s’est passé et un questionnement qui émane pour l’essentiel du présent de l’historien ». La couleur est clairement annoncée : ce dictionnaire participe à ce détour historiographie qui a pour ambition « d’exhumer la pluralité des écritures de l’histoire » et s’inscrit pleinement dans une « nouvelle réflexivité historienne ». Le défi est de taille.
Cette seconde édition de l’ouvrage de Mariette Sineau (paru en 2001 sous le titre Profession : femme politique. Sexe et pouvoir sous la Ve République) est considérablement augmentée (environ la moitié du volume). Actualisée, elle offre une vue d’ensemble sur l’inclusion des femmes dans la sphère politique depuis le début de la Ve République jusqu’à aujourd’hui. La période est divisée en deux parties : il y a un avant et un après 1997, date où précisément, avec l’arrivée de Lionel Jospin comme Premier ministre de cohabitation, l’Histoire semble s’accélérer en ce qui concerne l’accession des femmes à des postes politiques : l’une d’elles, Ségolène Royal sera même présente au second tour de l’élection présidentielle de 2007. Sont questionnés pour évaluer changements ou continuités, les institutions, le mode de scrutin, le cumul des mandats, le rôle prépondérant des partis mais aussi la personnalité des hommes politiques susceptibles de freiner ou de favoriser l’accès des femmes au pouvoir, et l’évolution de la société elle-même.
Issu d’une thèse de doctorat menée à bien sous la direction de Christophe Charle, cet ouvrage confirme toutes les qualités de l’auteur révélées par les précédents sur L’École française d’Extrême-Orient (1999), et L’Empire des géographes (2008). Jeune maître de conférences à Paris 1 Sorbonne, Pierre Singaravelou se confirme ici comme un chercheur déjà chevronné mais dont la curiosité n’a pas encore été émoussée par l’érudition et la fermeté parfois hardie du propos par la bienséance universitaire.
Après la publication d’un ouvrage de souvenirs dont le titre évoquait à lui seul le positionnement de Jean Charbonnel au sein de sa famille politique, À la gauche du Général, et d’un essai intitulé Le gaullisme en questions, l’ancien député-maire de Brive récidive à travers un livre d’entretiens avec Laurent de Boissieu, journaliste au service politique du quotidien
Le conflit nord-irlandais a été l’objet d’une bibliographie abondante qui ne s’est pas tarie avec les accords de paix de 1998. De nombreux ouvrages étudient aujourd’hui la manière dont cette région du monde est sortie de l’affrontement. Élise Féron, familière de ce conflit, fait à son tour le point dans son ouvrage Abandonner
Né d’une réflexion sur la controverse autour du massacre du 17 octobre 1961 qui émerge en France en 1997 au moment du procès Papon, l’ouvrage d’Emmanuel Blanchard issu de sa thèse est articulé autour de la problématique centrale des conditions de possibilité de cette tuerie policière. La police parisienne et les Algériens (1944-1962) s’inscrit ainsi dans le mouvement de renouvellement de l’historiographie de la guerre d’Algérie porté par une nouvelle génération de chercheuses et de chercheurs qui n’ont pas connu ce conflit, et qui peuvent à la fois l’analyser de manière plus distanciée, mais aussi en proposer de nouvelles approches « par le bas », focalisées sur les « expériences de la guerre au quotidien », comme ici le gouvernement policier des Algériens à Paris.
L'Organisation internationale du travail (OIT), dont le secrétariat permanent est le Bureau international du travail (BIT) à Genève, est une plus anciennes organisations internationales : fondée en 1919 dans le sillage du traité de Versailles, elle existe toujours aujourd'hui. Ce livre retrace quarante ans de son histoire, en suivant un plan chronologique organisé en trois parties.
Du 19 octobre 2011 au 15 janvier 2012, le musée de l’Armée (Hôtel des Invalides, Paris) a accueilli une belle exposition sur « Napoléon III et l’Italie. Naissance d’une nation 1848-1870 ». Placée sous le haut patronage du président de la République française et de son homologue italien, elle a été un des temps forts des célébrations françaises et italiennes du 150e anniversaire de l’unité d’Italie. Cette exposition a donné lieu à la publication d’un catalogue qui ne se contente pas de la reproduction commentée de quelques-unes des œuvres que le visiteur a pu admirer mais qui est riche d'analyses d’histoire et d’histoire de l’art complétant et approfondissant les enseignements que l'on a pu retenir en parcourant les différentes salles du musée.